Présidentielle: Faut-il être « une mère » pour être crédible ?

22 Mar

Marine Le Pen Flikr: cc crédit:  Neno°La semaine dernière, son discours est presque passé inaperçu. Dans un grand meeting, Marine Le Pen s’est présentée comme « une présidente de parti, femme, et mère de trois enfants ». Prenant tout le monde à contre courant, la candidate, qui prône le déremboursement de l’IVG, a mis en avant le fait qu’elle était une maman. C’est une première pour le FN. Mais pas pour l’extrême droite américaine. En effet, la stratégie est rodée chez les femmes politiques du Tea Party. Mieux, c’est souvent leur meilleur axe de campagne, une stratégie de marketing politique dont elles usent et abusent. Deux exemples: Michelle Bachmann et Sarah Palin. Ces deux anciennes candidates à la primaire républicaine ont toujours joué sur leur rôle de mère de famille nombreuse, n’hésitant jamais à exposer leur ribambelle de bambins aux médias et aux émissions de télé-réalité en tout genre. Pourtant cette tactique électorale n’est pas réservée à l’extrême-droite. Souvenez-vous, Ségolène Royal en 2007, avait été la première à revendiquer son statut de mère de famille…

A l’époque, la candidate du PS annoncait que le temps des femmes était venu, prônant une nouvelle façon de gouverner. Elle s’était affichée à plusieurs reprises comme une femme et une mère de quatre enfants. D’abord dans un discours devant les féministes le 8 mars 2007 et ensuite face à Nicolas Sarkozy le 2 mai lors du débat d’entre deux tours. (Une position moquée par Florence Foresti dans un sketch qui la présente comme la candidate « môman »).  Mais être une mère n’a pas toujours été considéré comme un avantage. On se souvient en 2006 des railleries de Laurent Fabius, qui à l’annonce d’une possible candidature de Royal avait déclaré avec classe : « Mais qui va garder les enfants? »

Revenons à Marine Le Pen. Au-delà de sa stratégie électoraliste, qui vise d’abord à séduire les mères de famille, quelques questions: est-ce une avancée pour une candidate à l’élection présidentielle de se présenter comme une mère ? Pourquoi le fait d’avoir des enfants, de les avoir élevés tout en menant une carrière serait un avantage pour diriger le pays ?

On pourrait croire que cette démarche est positive. Au premier abord, oui, mais c’est une illusion. C’est vrai, ici, on présente la maternité comme un atout et non comme un handicap dans une carrière politique. C’est pourtant loin, voir très loin de la réalité. Aujourd’hui faire carrière, surtout en politique, relève du parcours du combattant lorsqu’on a des enfants. La conciliation vie publique et vie privée est (presque) impossible. D’ailleurs, on pardonne moins à une femme de sacrifier sa vie personnelle ( famille, enfants), qu’à un homme. Et on comprends moins lorsqu’une femme fait le choix de ne pas avoir d’enfants, qu’un homme, surtout au profit d’une carrière politique. Dire:  je suis une mère et sous-entendre « une bonne mère », c’est un peu comme si ces femmes politiques justifiaient leur présence dans un camp, la politique, où on les attend moins. Elles semblent nous dire: « j’ai fait ce qu’on attendait de moi, j’ai désormais toute ma place sur l’échiquier politique ». Comme si une femme devait cocher d’abord cette case, avant d’être candidate à toute fonction électorale. On remarque d’ailleurs qu’aucun candidat homme à l’élection présidentielle ne se revendique comme un bon père de famille, que ce soit François Hollande ou Nicolas Sarkozy, tous deux pères de quatre enfants, ou encore François Bayrou, père d’une fratrie de six enfants.

Ce qui dérange pourtant, c’est de réduire le rôle d’une femme politique à celui de mère. Si les deux ne sont pas incompatibles, le fait d’être mère n’apporte rien en terme de légitimité. On ne gouverne pas un pays, comme on élève ses enfants, cela va de soi. Dans une société idéale, une femme ne devrait pas faire ses preuves, en se présentant comme une mère. Les femmes n’ont pas fini de prouver qu’elles sont crédibles…

Charlotte Lazimi

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